Imaginez qu’on vous vole votre identité. Même si vous êtes une personne ordinaire et que vous n’avez rien à cacher. Et que par la suite, on assassine violemment le chien (aveugle, qui plus est) dont vous vous occupiez depuis la mort de votre propriétaire. C’est assez pour bousculer une vie entière, n’est-ce pas ?
C’est la prémisse du premier roman de Julien Guy-Béland, Vos voix ne nous atteindront plus, publié chez Héliotrope cet automne. La protagoniste principale se retrouve bien malgré elle dans une quête dont elle n’a jamais voulu. Cela la mènera sur les traces de la hackeuse qui a ruiné sa vie et ira à sa recherche jusqu’à la côte ouest des États-Unis.
L’histoire ambitieuse de Guy-Béland est un mélange contrasté de banalités quotidiennes et d’événements tellement tordus et hors du commun qu’il est difficile de les imaginer. Avec cela, l’auteur fait aisément baisser la garde au lecteur avant de le surprendre en force à la page suivante. Si vous aimez être pris au dépourvu, vous serez bien servi avec ce premier suspense. Dans un même ordre d’idée, Vos voix ne nous atteindront plus est écrit avec un style qui nous tient en haleine. Par exemple, les dialogues sont intégrés directement aux phrases, les chapitres sont très courts, le vocabulaire est parfois choquant et tout cela augmente le sentiment d’urgence indomptable du roman.
Ce qui vous accrochera peut-être, c’est le style franglais de l’auteur. Non seulement on retrouve beaucoup d’anglais quand les personnages sont aux États-Unis, ce qui est tout de même très compréhensible, mais l’ensemble de l’œuvre est imprégné de la culture métissée d’anglicismes d’une Montréal millénariale. Ne me méprenez pas, je ne considère pas cela comme un défaut. Guy-Béland a très bien saisi la familiarité du langage et l’utilise avec un souci évident de souligner avec fidélité la réalité. Néanmoins, pour certains lecteurs, il est évident que la multitude de mots de remplissage anglais pourra être un frein.
Somme toute, Vos voix ne nous atteindront plus est un excellent premier effort. Il cadre très bien avec ce qu’a l’habitude de nous offrir Héliotrope. Vous apprécierez certainement l’œuvre si vous avez un penchant pour les univers un peu disjonctés dans le surréalisme anxieux.
- Auteur : Julien Guy-Béland
- Éditions : Héliotrope
- Pages : 195 pages
- Date de parution : février 2019
Crédit photo : Patrice Sirois