***coup de cœur***
Elizabeth Lemay a écrit un premier roman publié chez Boréal en 2022, Daddy issues, que j’avais beaucoup aimé. Cet été, elle a publié un récit puissant intitulé L’été de la colère.
Le récit d’Elizabeth Lemay débute alors qu’elle nous fait cette grave confession: je crois que j’ai été violée. En parallèle, l’arrêt Roe c. Wade vient d’être invalidé par la Cour Suprême aux États-Unis, s’ouvre alors l’été de la colère. Pourquoi, toujours, cette inégalité, cette masculinité toxique ? Lemay nous transporte alors dans son passé, dans sa vie avec sa culture, ses lectures en tentant de trouver des réponses, l’espoir d’une révolution:
Cette révolution, j’ignore comment l’entamer. hooks nous fait remarquer que si les théories féministes trouvent si peu d’échos dans la société, c’est qu’elles demeurent principalement véhiculées dans les livres, lus bien sûr en grande majorité par des femmes. Pour elle, la révolution devra passer par la culture populaire comme moyen de nous montrer le chemin vers une vision égalitaire et nous enseigner l’art du possible.
– p.147
J’ai lu ce livre alors que le procès Mazan, en France, est bien débuté, qu’on débat encore sur le concept du consentement là-bas. Est-ce qu’une femme droguée, inconsciente peut avoir donner son consentement au viol de près de 70 hommes ? Est-ce que son mari avait, par défaut, le consentement de sa femme pour la violer et la filmer pendant 30 ans ? Bien sûr que non. Pourtant, ce procès révolte qui ? Encore les femmes. Où sont les hommes révoltés, alliés de la cause féministe ? Ils ne semblent pas être nombreux à s’intéresser à cette tragédie et c’est ce qu’Elizabeth Lemay déplore aussi dans son livre. Tant que les hommes ne se révolteront pas et ne voudront pas changer, l’inégalité entre les sexes perdurera. Nous serons toujours plus nombreuses à devoir surveiller ses arrières, à devoir faire face aux micro agressions et aux agressions sexuelles “normalisées”.
L’été de la colère est à mettre entre toutes les mains, celles des hommes en premier même. L’écriture puissante de l’autrice m’a rappelé, à plus d’une reprise, celle de Nelly Arcan et de Marie-Sissi Labrèche. Une œuvre importante, forte qui reflète exactement la fragilité du peu que nous avons pu gagner au fil des ans comme droits des femmes. Notons aussi l’exhaustive bibliographie dont s’est inspirée Elizabeth Lemay, le livre s’est appuyé sur de très grands noms de la littérature féministe, des autrices que les hommes devraient également lire pour qu’enfin on puisse parler d’un vrai pas vers l’égalité.
- Autrice: Elizabeth Lemay
- Maison d’édition: Boréal
- Parution: 23 août 2024
- Nombre de pages: 162
Crédit photo: Valérie Ouellet