L’autrice de l’album jeunesse, Andrea Wang, Le goût du cresson a écrit : Dans une famille, les secrets sont toujours mal gardés. Les mémoires silencieuses cloisonnent les êtres. Partagées, elles les réunissent et consolident leur avenir commun.
J’extrapole peut-être, mais je pense que c’est un peu ce qu’Alexandra Boilard-Lefebvre a voulu faire avec ce premier roman : ouvrir les mémoires afin de connaitre la vraie histoire de sa grand-mère Thérèse Larin.
Ce roman-enquête retrace photo par photo, témoignage par témoignage l’histoire de Thérèse Larin, sa jeunesse, son adolescence, son mariage, son déménagement jusqu’à son suicide même s’il n’a pas été appelé ou prononcé comme tel à l’époque. L’autrice défonce un mur à la fois afin de faire la lumière et de tenter de comprendre ce qui a mené sa grand-mère, mère de trois jeunes enfants, à consommer une importante quantité de barbituriques et d’en mourir. Son grand-père, l’ex-époux de Thérèse, a toujours refusé d’en parler. Il s’est même débarrassé, quelques heures ou quelques jours après sa mort tragique, de tous ses effets personnels afin d’effacer cet épisode qu’on soupçonne très douloureux.
C’est tout de même incroyable de penser que trois jeunes enfants ont grandi sans avoir connu leur mère même à travers les autres. Ça aura pris le travail impressionnant de recherche et d’enquête de sa petite-fille pour raviver la mémoire de cette personne.
J’ai trouvé ce roman ultra touchant, nous sommes plongés au cœur de l’histoire d’une famille, mais aussi d’une époque. Celle où on ne parlait pas de ces choses-là, de l’ennui des femmes à la maison, de la dépression. On a l’impression d’être presque passé à côté de quelque chose qui aurait fait mourir Thérèse Larin deux fois. Les témoignages des membres de la famille ou des amis font ressortir tout le secret, tous les tabous autour de ces affaires-là (mariage précoce, isolement, santé mentale). Alexandra a gardé la transcription des propos exacts avec leurs hésitations et leurs vocabulaires et ça apporte une authenticité troublante au récit déjà bouleversant.
Puis, au bout de la lecture, j’ai eu la conviction que non seulement Alexandra Boilard-Lévesque a retrouvé une partie de son histoire, mais qu’elle avait un peu délivré tous ceux qui avaient connu sa grand-mère aussi. Quel récit personnel et important ! Moi, il m’a donné le goût d’avoir une conversation avec mes grands-parents malheureusement décédés, ce n’est pas grave, j’en aurai avec mes parents, mais Une histoire silencieuse est certainement loin d’être la seule.
Je vous invite à vous plonger dans ce récit unique, on en ressort bouleversé et avec l’envie de donner une voix à tous ceux qui n’en ont pas eu la chance parce que chaque histoire en a long à raconter.
- Autrice: Alexandra Boilard-Lefebvre
- Maison d’édition: La Peuplade
- Parution: 15 janvier 2025
- Nombre de pages: 256
Crédit photo: Valérie Ouellet
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