Le seul motif de mon anxiété, c’est l’anxiété. J’habite un non-événement.
V. Roch-Lefebvre, p. 90
Bipolarité. Dépression. Manie. Crises. Côlon irritable. Tous ces mots qui devraient résonner avec empathie, mais qui éveillent parfois (souvent) jugement, critique, incompréhension. Ces mots qui font peur, qui suscitent silences, murmures, suspicions. Ces mots, l’héroïne de Tout ce que j’ai fait pour ne pas quitter ma chambre les connaît trop bien. Elle les vit de l’intérieur, elle les soupèse, elle les condamne et apprend à les aimer, elle les haït, elle les doute, elle les cache, elle s’en obsède.
Entre une relation forcément compliquée avec ses parents, les collègues de travail qui semblent toujours l’espionner, mais qui ne font peut-être que co-exister à ses côtés, et la solitude, le quotidien est lourd, souffrant.
Dans ce récit d’une grande force, Valérie Roch-Lefebvre nous fait expérimenter de l’intérieur la maladie mentale. Grâce à son écriture précise, incisive, franche, nous sommes (parfois à l’aise, parfois moins) aux côtés de l’héroïne en tout temps : au coeur même de ses souffrances, de ses incertitudes, de ses craintes profondes. On y découvre la peur d’être jugée, la colère face aux diagnostics, l’incompréhension, et surtout, ce désir de disparaitre, comme une envie terrible d’être vue, enfin, sans jugement ni poids. On se perd parfois dans ce qui appartient à la réalité ou ce qui est de l’ordre de l’angoisse, et c’est ainsi que l’on comprend le mieux la dureté de la fragilité mentale de l’héroïne.
Un roman poignant, que j’ai lu en retenant mon souffle, touchée, émue, révoltée.
- Autrice : Valérie Roch-Lefebvre
- Maison d’édition : La Mèche
- Date de parution : août 2022
- Nombre de pages : 123
Crédit photo : Annick Lavogiez