Littérature québécoise Quoi lire?

Le retour au pays de l’enfance

Au grand soleil

C’est la douceur des mots qui m’a d’abord séduite, conjuguée à une tendresse réservée à chacun de ses personnages et surtout, tout ce soleil qui traverse la lecture, ce criant besoin de chaleur que je ressens au cours de cet été bipolaire. Abla Farhoud, romancière et dramaturge, nous présente son pays, le Liban, à travers ce roman joliment intitulé Au grand soleil cachez vos filles.

L’histoire tricotée par l’auteure est celle d’une famille, les Abdelnour, qui retourne dans son pays natal après plus de quinze années passées au Québec. Le pays tant rêvé, ce paradis perdu, ne ressemble plus à celui quitté. Ou peut-être est-il le même, mais la distance l’a enjolivé, et ceux qui ont émigré ont changé au contact de leur pays d’accueil. Tour à tour certains membres de la famille Abdelnour prendront la parole pour parler de ce choc ressenti à leur arrivée, de l’adaptation qui se fera tantôt bien, tantôt plus difficilement. Abla Farhoud y décrit les mœurs et coutumes, les non-dits qui ponctuent la vie au Liban et surtout les codes que les parents ont si bien intégrés avant leur exil qui sont ravivés par ce retour au pays :

Mais où sont-elles écrites, ces règles?!

― Nulle part. Mais moi, je ne peux pas faire semblant que je ne les connais pas et que je ne suis pas d’ici. J’ai été élevée ici. Quand je vivais au Canada, je faisais comme les gens de là-bas, maintenant, je suis ici, je fais comme les gens d’ici.

Les enfants ont de la difficulté à se retrouver à travers ces revirements de mentalité présentés par leurs parents alors qu’au Québec, par exemple, ils encourageaient une de leur fille à devenir comédienne, alors qu’au Liban, ils tenteront de l’en dissuader, puisque les comédiens y seraient perçus comme des gens aux mœurs légères.

Le choix de l’auteur de mettre en lumière la situation de la femme au Liban m’a charmée. J’ai aimé cette impression que laisse le roman d’en apprendre davantage sur un pays et ses habitants, et aussi sur ces expatriés qui sont de retour au pays qui les a vus naître. Seul bémol au tableau : la langue. En effet, je l’aurais aimée plus riche, plus musicale, voire plus complexe. Ce roman a toutefois la qualité de son défaut : il est facile à lire, très accessible. Quelques perles d’écriture ponctuent tout de même le roman :

C’est vrai que maman est ce genre de personne qui nous envahit davantage par son absence que par sa présence.

Au grand soleil cachez vos filles m’a certes donné envie de parcourir le Liban, de me laisser bercer par l’omniprésence du soleil, mais l’idée que la femme doive s’y cacher me rend infiniment triste.

 

Une autre critique du même livre par Jeanne Lavictoire ici.

Une entrevue avec l’auteure ICI.

  • Auteur : Abla Farhoud
  • Nombre de pages : 304
  • Date de parution : 26 avril 2017
  • Éditeur : VLB éditeur

Crédit photo : Karine Villeneuve

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