Elles sont veuves, divorcées, abandonnées, confuses ou libérées. Elles sont seules depuis des années, voire des décennies. Certaines en souffrent, d’autres sont en paix. Des femmes seules, par choix ou destin, qui bousculent inévitablement nos idées sur l’amour romantique. Julie Bosman en a interviewé une dizaine qui ont inspiré ces quinze courtes nouvelles sur les multiples faces de la solitude au féminin.
Avec délicatesse et doigté, l’autrice documente l’intimité de ces femmes. Souvent mélancoliques, les récits ne montrent pas moins une grande acceptation de cette solitude. Il demeure que la tristesse émane essentiellement du regard extérieur que l’on porte sur elles. Dans un monde où la quête de l’âme sœur est l’eldorado du désir, des femmes qui font leur vie sans compagnon se butent nécessairement au jugement d’autrui. L’incompréhension et la pitié qu’elles suscitent les usent souvent bien plus que la solitude elle-même.
Et c’est ainsi que l’autrice, dans une démarche qui s’apparente au documentaire, leur donne une voix et arrive du même coup à briser une certaine solitude et faire tomber de nombreux clichés. En nous invitant dans le privé des plus timides et même des grandes effarouchées, on goûte à la profondeur émotive de ces femmes, multiples et complexes. Chacune des nouvelles de Nous sommes bien seules a une voix propre et un abandon distinctif, finement recueilli par Julie Bosman.
La fin de la récré a marqué le début du reste de ma vie. Désormais, mon incessante mission serait de passer inaperçue, d’avancer dans la vie sans me faire remarquer, de me faufiler dans les craques du plancher. Je deviendrais indistincte. Je serais l’incarnation de la banalité. Je passerais en dessous du radar. Plus personne ne penserait à venir s’asseoir entre mes cuisses parce que je n’existerais plus.
Comme un florilège de confidences, on ne peut accueillir le bouleversant Nous sommes bien seules qu’avec humilité et silence pour laisser toute la place à ces femmes qui se taisent et n’existent pas aux yeux d’autrui.
- Autrice : Julie Bosman
- Nombre de pages : 100 pages
- Date de parution : 2017
- Éditeur : Leméac
- ISBN : 978-2-7609-4747-4
Crédit photo : Caroline Dawson
Carole Harel
9 décembre 2018 à 8:57 amBonjour Caroline. Papier très intéressant et touchant. Et sachez que la vie de ces femmes a trouvé un écho pour moi et mes amies comédiennes qui avons monté un spectacle de lecture publique des textes de Julie. Je vous mets un lien vers notre groupe.
https://www.facebook.com/Les-ZElles-894066220751739/?ref=br_rs
Merci pour vos mots!