Lauren Groff signe ici une fiction historique féministe en inventant la vie de la mystique Marie de France. Réellement, on ne la connait que parce qu’elle fut la première femme écrivaine à la Renaissance, certains historiens croient à une parenté lointaine avec Henri II Plantagenêt et Aliénor d’Aquitaine, l’autrice en fera une de leur parente bâtarde.
Alors que la jeune Marie est élevée par sa mère et ses tantes, de véritables amazones, sa mère se fait violer par Geoffroy V, de cet acte naîtra Marie, une enfant laide et géante. Elle apprendra l’art de la guerre, mais rapidement se retrouvera seule. C’est alors que la royauté la prendra sous son aile pendant un certain temps. Marie de France tombera amoureuse d’Aliénor, cette femme forte et intelligente qui, pourtant, la déteste. Aliénor d’Aquitaine enverra Marie devenir abbesse en Angleterre dans une abbaye où toutes les religieuses se meurent.
Marie prendra ce rôle très au sérieux et fera de l’abbaye, un domaine fleurissant où les femmes se côtoient afin de devenir le meilleur d’elles-mêmes.
Le pouvoir d’une femme n’existe qu’aussi loin qu’on l’y autorise; la sage Aliénor a compris qu’elle peut seulement trouver sa liberté sous ces formes qu’on ne peut lui enlever. Marie s’imagine un instant telle une minuscule silhouette gravissant les murs ; oh, un jour elle trouvera son chemin pour passer par-dessus les remparts de la reine, un jour elle sera à l’intérieur, à l’abri du vent.
– p. 62
Marie qui ne croyait guère en Dieu avant d’entrer à l’abbaye deviendra une fervente défenderesse du sacré et aura même des visions qui lui permettront de prédire ce que l’avenir lui réserve, à elle et à l’abbaye.
Sans l’erreur d’Ève, la pureté de Marie ne pourrait exister.
Et sans le ventre d’Ève, qui est la Demeure de la Mort, il ne pourrait y avoir de ventre de Marie, qui est la Demeure de la Vie.
Sans la première matrix, il ne peut y avoir de salvatrix, la plus grande matrix entre toutes.
– p. 114
Matrix est une excellente fiction historique qui met en scène des femmes extraordinaires: Aliénor d’Aquitaine, Marie de France et bien d’autres. Je me suis laissée entraîner dans ce récit qui alterne les thèmes du sacré et du profane d’une façon unique. On flirte avec l’érotisme tout au long de la lecture. Le lecteurice prend aussi conscience de tout l’apport des femmes dans l’histoire pour la transmission des savoirs, le progrès de la connaissance et des sciences. C’est un roman qui vaut certainement la peine d’être lu, complètement différent des autres fictions historiques, le côté féministe et littéraire de l’ouvrage apporte quelque chose de sublime à cette œuvre.
- Autrice: Lauren Groff
- Traductrice: Carine Chichereau
- Maison d’édition: Alto
- Parution: 11 septembre 2023
- Nombre de pages: 247
Crédit photo: Valérie Ouellet
