Entrer dans l’univers de Kim Thuy, c’est comme entrer dans une maison de porcelaine. On est émerveillé par la douceur et l’harmonie de sa prose, qui ne bouscule jamais ni n’effraie. Toujours en nuance, toujours dépouillée, son écriture se révèle plus belle que jamais dans ce nouveau roman portant sur la destruction.
Avec Em, Kim Thuy raconte par bribes la guerre du Vietnam, son pays natal. Pour ancrer son récit, elle s’est inspirée d’une photo prise pendant le conflit, qui montre un tout jeune enfant qui veille sur un nourrisson couché dans une boîte de carton. De là naît une histoire de survie bouleversante, bâtie sur des faits troublants, comme l’opération Babylift, conduite par les Américains afin d’évacuer les orphelins de guerre nés de pères américains. À travers des histoires qui se télescopent, l’auteure nous conduit tantôt dans des plantations d’hévéa, où l’on saigne les arbres pour en extraire le caoutchouc, tantôt dans les zones de conflit, où des soldats tentent d’extraire des enfants innocents à l’horreur des bombardements. Un roman fort, qui mérite certainement toute l’attention médiatique dont on l’entoure.
La guerre, encore. Dans toute zone de conflit, le bien se faufile et trouve une place jusque dans les fissures du mal. La trahison complète l’héroïsme, l’amour flirte avec l’abandon. Les ennemis avancent les uns vers les autres dans un seul et même but, celui de vaincre. Dans cet exercice qui leur est commun, l’humain se révélera à la fois fort, fou, lâche, loyal, grand, grossier, innocent, ignorant, croyant, cruel, courageux… Voilà pourquoi la guerre. Encore.
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- Autrice : Kim Thuy
- Éditions : Libre Expression
- Nombre de pages : 152
- Parution : novembre 2020
Crédit photo : Vicky Milot