27 décembre 1974. St-Amé de Liévin-Lens. Nord de la France. Des mineurs se lèvent bien avant les aurores pour se rendre à la fosse. Une routine réglée au quart de tour. Les mêmes gestes répétés jour après jour, génération après génération.
Aujourd’hui, il y aura un coup de grisou. Une explosion souterraine. Aujourd’hui, 42 hommes ne reverront pas la lumière du jour.
Pour Michel Flavent, petit frère d’une des victimes, cette tragédie s’inscrira dans chaque particule de son corps, dans tous les recoins de son être. Une obsession, voilà ce que cette journée fatidique deviendra pour lui. Comment peut-on lui en vouloir à cet homme qui porte ses morts à bout de bras : son grand frère d’abord, puis son père, sa mère, sa femme? Mais, attention, ce récit n’est nullement linéaire. L’intrigue est habilement ficelée et magnifiquement écrite. Les rebondissements ont force de coup de poing, que dis-je, de secousse sismique. Car bien malgré moi, je lui en ai voulu à cet homme meurtri. J’ai voulu le bercer autant que le secouer. À la moitié du livre, je ne savais plus dans quel camp je me trouvais. Je ne savais plus différencier les bons des méchants.
J’ai rarement été prise d’émotions aussi viscérales en lisant un livre. Cette histoire de mineurs morts à la fosse, pourtant inspirée d’un fait historique réel, ne résonne rien de personnel chez moi. Cela ne m’a pas empêché de ressentir dans ma chair la boule au ventre, les larmes aux yeux et les frissons sur tout le corps. Colère, impuissance, trahison.
Au delà de l’émotion, on retrouve dans ce roman une réelle réflexion sociale où s’entrechoquent des idées, des points de vue. Luttes prolétaires et rébellions, responsabilités individuelles et collectives, vengeance et rédemption. Cette histoire a beau être celle d’un seul homme, elle est enracinée dans le destin d’une région entière, dans les entrailles de la terre qui a vu naître, grandir et mourir ses hommes, au propre comme au figuré.
Le Jour d’avant de Sorj Chalandon a eu sur moi l’effet d’un coup au coeur, mais il reste imprégné en moi comme un de mes plus grands coup de coeurs littéraires à vie. J’en ai des frissons en l’écrivant.
- Titre : Le jour d’avant
- Auteur: Sorj Chalandon
- Nombre de pages: 326 pages
- Date de parution: 30 août 2017
- Éditeur: Grasset
Crédit photo: Marie-Hélène Legault