*** Coup de coeur ***
Je ne fais jamais que décrire une expérience subie. Il n’ a pas de magie, l’écriture est une tentative vouée à l’échec de rassembler ce qui se désassemble. Je voudrais écrire un texte capable de guérir mon père.
– p. 94
Le père de Simon va mourir. Pas aujourd’hui, mais bientôt. La sclérose en plaques va détruire, petit-à-petit, son corps, ses habitudes, son moral, sa vie. Simon est dévasté. Entre sa propre paternité et les souvenirs avec son père, Simon partage son innommable douleur, réfléchi à la mort et au sens de la vie. Envahi par ses propres bobos, prétextes pour nourrir ses angoisses, Simon, chaque jour, tente de survivre à cette nouvelle réalité. Mais est-ce tout simplement possible ?
Il faut m’imaginer en pleurs. Je ne l’écrirai pas toujours, ça ne finirait plus, mais durant les événements que je raconte, je pleure beaucoup, je découvre les larmes, le sel de mes larmes, la fatigue de trop pleurer et de se sentir vide, déshydraté, perdu dans la tristesse, le vaste désert de la tristesse. Pleurer me révèle une dimension de l’amour que je préférais ignorer : les personnes qu’on aime doivent mourir, et c’est dans le terreau de cette vérité simple que l’amour prend racine, dans l’impossibilité de durer et dans la rareté des occasions de se voir. Je pleure mon père, mais aussi, déjà, l’insuffisance des moments qu’il me reste avec lui.
– p. 13
Il m’est difficile d’écrire sur Chaque blessure est une promesse tant j’ai été portée par l’émotion qui transperce chaque phrase, ou plutôt la terrible réalité qui se cache dans chaque phrase : l’attente de la mort de quelqu’un d’aimé et qui va laisser un épouvantable vide.
Ce roman-confession se lit comme un secret. Loin de toute positivité toxique, Simon Brousseau explore avec franchise toutes les douleurs qui viennent avec la maladie d’une personne aimée. C’est brutal, c’est triste, parfois absurde, terriblement renversant.
(…) les morts méritent qu’on les pleure abondamment. Je veux être à l’écoute de la souffrance qu’engendre en moi la mort à venir de celui qui m’a vu naître. Et, contre la raison, je veux rester dans la souffrance que provoque la violence absurde de sa maladie.
– p. 50-51
Un livre époustouflant, à lire et à relire comme un catalyseur des deuils dont on ne se remet jamais tout-à-fait.
- Auteur : Simon Brousseau
- Maison d’édition : Heliotrope
- Date de parution : septembre 2023
- Nombre de pages : 209
Crédit photo : Annick Lavogiez