Lawrence Hill est un écrivain canadien surtout connu pour son roman Aminata (2011 en français) qui a remporté le Commonwealth Writers’ Prize. Ce printemps, Mémoire d’encrier nous offre la traduction de son roman jeunesse : Béatrice et Croc Harry.
Béatrice, une enfant noire, se réveille dans une forêt et ne comprend pas pourquoi elle se trouve à cet endroit. Pour sortir de cette impasse, elle s’allie d’amis improbables comme le crocodile Croc Harry, le lapin Horace Harrison Junior, Troisième du nom et la mygale Crépue, entre autres.
L’œuvre s’adresse à un jeune public, mais elle est accessible pour tous·tes. Même si elle met en avant des animaux qui parlent, le fond de l’histoire est tellement bien construit que même les plus sceptiques du réalisme magique seront convaincus. En fait, le nouveau roman de Hill a des airs de L’histoire de Pi, Le monde de Sophie ou Alice au pays des merveilles si on échange les hallucinogènes pour les droits civiques.
Car, vous l’aurez désormais compris, il s’agit d’une histoire politique. À travers ses aventures à priori saugrenues, Béatrice est en quête identitaire. Sa place d’humaine incongrue dans la forêt s’avère rapidement une métaphore pour la marginalisation des communautés noires en occident. Cette allégorie est assez claire pour être comprise par un public jeune, mais aussi assez discrète pour que l’histoire reste une métaphore et non un essai. L’équilibre trouvé par Hill est particulièrement efficace. Il a réellement trouvé le ton juste pour ce qu’il voulait faire. En plus, il ajoute à cela quelques détournements absolument inattendus pour peaufiner son histoire déjà très complète.
Finalement, Béatrice et Croc Harry est un livre formidable pour ressentir allégoriquement la marginalisation. Bien qu’une œuvre un peu longue (l’histoire se déroule sur plus de 300 pages et est suivie d’une annexe facultative), elle est certainement un extraordinaire outil d’enseignement, tout en demeurant divertissante.
- Auteur : Lawrence Hill (traduction de Stanley Péan)
- Éditions : Mémoire d’encrier
- Parution : 8 mai 2024
- Pages : 424 pages
Crédit photo : Patrice Sirois