Elisabeth Cardin est copropriétaire du restaurant Manitoba à Montréal, où sont mis à l’honneur ingrédients et saveurs du terroir. En signant cet essai, elle tente de nous sensibiliser et de nous amener à réfléchir sur la façon dont on cultive le territoire, sur nos habitudes alimentaires aussi. J’ai eu la chance, un peu comme Elisabeth Cardin, d’avoir quelqu’un dans ma famille pour m’apprendre, très tôt dans la vie, à identifier différentes plantes et racines et de participer à la cueillette de celles-ci. Il est tout à fait véridique que ces connaissances, malheureusement, se perdent et que les mauvaises herbes des uns sont en fait des trésors pour les autres.
À une époque où tout va rapidement, où les changements climatiques sont omniprésents, on se doit, je pense, de reconsidérer notre approche à l’environnement et la façon dont nous le gérons dans la vie de tous les jours. C’est exactement ce que l’ouvrage propose.
Plusieurs personnes ont décidé de faire un jardin pendant le confinement et c’est une chose excellente, mais pourquoi ne pas pousser plus loin cet effort et s’encourager à réapprendre à identifier et à cueillir les produits de nos forêts et de nos champs. L’autrice aborde aussi deux activités qu’elle aime beaucoup : la chasse et la pêche. Pour les avoir moi aussi pratiquées toutes deux, j’ai retrouvé la sensation si bien décrite lors de l’attente :
[…] il pleuvra, parfois très fort. Je ramasserai des chanterelles en tube dans la tourbière. J’observerai des renards, des moufettes, des mésanges et des castors. J’aurai le souffle coupé à la vue des horizons et des premiers rayons de lumière traversant la canopée. Nous garderons espoir. Le temps deviendra flou. Nous resterons ancré.e.s dans le moment présent, comme aucune séance de méditation guidée ne nous permettrait jamais de le faire. Et le soir venu, nous nous retrouverons au camp, réchauffé.e.s par l’ardeur du feu et celle de l’amitié.
– p. 26
L’essai est entrecoupé de petites anecdotes appelées « scènes de restaurant », l’autrice y parle des producteurs et des collaborateurs du restaurant, des difficultés et des joies d’être restauratrice. J’ai bien aimé ces scènes, elles nous permettent de voir jusqu’à quel point l’autrice tente de mettre en pratique sa vision du territoire et de nous plonger, l’instant de quelques lignes, dans cet univers.
Enfin, le livre d’Elisabeth Cardin est l’équivalent de prendre une grande respiration. Elle nous permet de prendre un temps d’arrêt et nous invite à faire plus pour retrouver cet équilibre avec la terre qui nous entoure. À lire et à offrir.
Si l’envie de nous réconcilier avec le territoire nourricier se fait sentir de manière aussi pressante, c’est bien évidemment parce que nous en sommes aujourd’hui déconnecté.e.s. La rupture, causée par l’emprise de l’industrie sur nos habitudes alimentaires, menace non seulement nos écosystèmes, mais aussi le lien intime et nécessaire qui nous relie au pays de nos ancêtres.
– p. 12
- Autrice : Elisabeth Cardin
- Maison d’édition : Atelier 10
- Parution : 2021
- Nombre de pages : 73
Crédit photo : Valérie Ouellet