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Toutes les femmes sont d’abord ménagères

Toutes les femmes sont d'abord ménagères

Je voulais me plonger dans le nouvel essai des Éditions Somme Toute depuis ma lecture enthousiaste du Dictionnaire critique du sexisme linguistique. Le texte de Camille Robert qui s’y trouvait était à la fois pertinent, approfondi et bien écrit. Je savais donc que je retrouverais dans Toutes les femmes sont d’abord ménagères. Histoire d’un combat féministe pour la reconnaissance du travail ménager une analyse intelligente et minutieuse. L’historienne ne m’a pas déçue.

Camille Robert s’intéresse à la reconnaissance du travail ménager avec une perspective historique. Il s’agit donc d’un livre qui porte moins sur le travail ménager en tant que tel, que sur la perception qu’on en a eu à travers le temps, au Québec. En ce sens, on ne se surprendra pas de trouver moins une analyse sociologique quantitative sur les heures ou le type de travail domestique effectué par les femmes, mais plutôt une revue de la façon dont les féministes l’ont appréhendé à travers le temps. L’autrice part du constat où les femmes sont encore celles qui, majoritairement, assurent la responsabilité du care, du travail ménager et de la charge mentale.

Aujourd’hui, face aux nombreuses questions non résolues, et aux nouveaux enjeux qui émergent, je souhaite remettre de l’avant le travail invisible comme thème central pour penser l’oppression des femmes et des personnes assignées femmes.

L’autrice fait donc une analyse fine et étoffée des luttes féministes et des discours qui ont visé à les rendre visibles. Loin d’un regard uniquement individuel, elle réussit brillamment à mettre en perspective les rapports de genre qui sous-tendent le travail domestique et, en ce sens, politise adroitement notre façon de concevoir le travail réalisé par les femmes dans toutes les sphères de la vie intime : le ménage, le soin, le care, la charge mentale. En fait, la seule critique que l’on pourrait adresser à cet essai est qu’il est un peu scolaire et ne réussit pas tellement à s’éloigner du mémoire de maîtrise que l’on devine derrière son écriture. En même temps, il en garde les grandes qualités : une analyse détaillée de la littérature sur le sujet, une clarté impeccable et un fil d’idées facile à suivre.

Nous ne pouvons que vous recommander sa lecture et aurions aimé que le livre poursuive son étude au-délà de 1985, peut-être parce qu’on devine qu’avec sa sensibilité aux luttes plus englobantes, l’autrice aurait alors réussi à rendre son analyse davantage intersectionnelle et ainsi démontrer que si toutes les femmes sont d’abord ménagères, certaines (les femmes au bas de l’échelle sociale, les femmes racisées, etc.) le sont plus que d’autres.

 

  • Autrice : Camille Robert
  • Nombre de pages : 178 pages
  • Date de parution : 2018
  • Éditeur : Éditions Somme Toute
  • ISBN : 978-2-924606-62-9

 

 

Crédit photo : Caroline Dawson

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