La causerie avec Alexandre Jardin à la Librairie de Verdun de vendredi dernier était vraiment une réussite formidable et inspirante.
L’auteur français de renommée internationale a commencé par prendre une photo des spectateurs qui s’étaient déplacés en très grand nombre pour prouver à sa fille que certaines personnes lisaient ses livres. Quelqu’un dans la foule déjà entreprenante lui a demandé l’âge de son enfant. Jardin, enthousiasmé, a promptement répondu qu’elle avait cinq ans.
C’est ainsi que s’est déroulée la discussion qui a rapidement dépassé le cap de l’heure. Le libraire Billy Robinson n’a pas eu besoin de poser beaucoup de questions à l’auteur pour le faire parler. Visiblement heureux de raconter des histoires, Jardin a parlé de sa mère, sujet de son dernier livre, mais aussi de son père et de comment il entrevoit l’écriture. Même si on voit que dans la tête d’Alexandre Jardin les idées se bousculent, l’homme prend bien le temps de choisir les bons mots dans ses réponses. Il parle lentement et clairement, ne laissant que des mots justes sortir de sa bouche.
Il décrit sa mère comme étant « une femme d’une liberté complète et complexe » et il n’a pas hésité à souligner ses incohérences fréquentes comme si c’était une qualité. Amante de plusieurs hommes, intense et surtout vraie, la mère d’Alexandre Jardin semble mériter toute l’admiration que son fils lui voue. Il soutient d’ailleurs qu’il a écrit son dernier livre, Ma mère avait raison, car « si elle disparaît, elle ne partira pas ».
Son livre a aussi été une occasion pour parler de liberté. Jardin trouve triste de vivre dans la peur. Il a applaudi d’ailleurs l’épidémie de liberté de la part des femmes lors des derniers temps. En pensant à sa mère, il dit:
La liberté, ça a un goût extraordinaire, quand même. […] Qu’est-ce qui est le plus important ? Vivre ou avoir peur ? Avoir la crainte est une folie pure. […] C’est extrêmement grave de ne pas être réel.
Alors qu’il parlait des nombreux amants de sa mère, une dame lui a demandé s’il était comme elle. Après un silence exquis, Jardin a simplement répondu :
J’essaie d’être vrai. C’est très passionnant.
Il a aussi raconté un passage de son livre où sa mère a brûlé un manuscrit sur lequel il avait travaillé pendant un an et demi, car il n’était pas de lui. Cet événement, assez symbolique, l’a alors forcé d’écrire en six mois un prochain manuscrit qui deviendra le roman Le Zèbre et qui obtiendra le prix Fémina en 1988. Il a ajouté que « quand vous écrivez, vous devez écrire un livre que vous seul pouvez écrire ».
Il a ensuite expliqué que ses livres visent à sculpter le lecteur et non le faire assister à une peinture. Il a nommé plusieurs auteurs réussissant avec brio ce défi, dont le Général De Gaule. Jardin n’a pas hésité à le comparer à René Lévesque, ce qui a enfiévré la foule conquise depuis le tout début.
Avant de s’affairer à une longue file de dédicaces, Alexandre Jardin a conclu en souhaitant ceci :
J’espère que ça va foutre le bordel dans vos vies, de lire ce livre !
Crédit photo : La librairie de Verdun