Mariana Enriquez est une journaliste et autrice argentine faisant partie d’une génération d’auteurs nommée «Le nouveau récit argentin», encore très active aujourd’hui. Elle acquiert une reconnaissance internationale en gagnant le prix espagnol Herralde pour son roman publié en 2019, Nuestra parte de noche. Cet hiver, Alto propose la traduction signée Anne Plantagenet de ce chef-d’œuvre aussi lauréat du Prix des libraires du Québec, catégorie nouvelle-roman-récit hors-Québec, en 2022.
En pleine dictature argentine, un père, Juan, et son fils, Gaspar, traversent le pays. Nous comprenons assez rapidement que derrière tout ce qui se trame dans en Argentine, une secte, l’Ordre, tente de calmer une force inconnue nommée l’Obscurité avec de grandes cérémonies et des sacrifices humains. Juan sait que son fils sera inévitablement l’élu de cet Ordre et il cherche une façon de l’aider à s’en sortir. Néanmoins, il comprend, grâce à son entourage, ses rencontres et le souvenir de sa défunte femme, qu’échapper à son destin, surtout lorsqu’il est voulu par une secte qui contrôle le pays, n’est pas à la portée de tous.
Notre part de nuit métisse les genres du début à la fin. C’est à la fois un roman de route, un récit d’horreur, une quête métaphysique, une critique politique et un poème gothique. On fait des va-et-vient dans le temps et on change de scène allègrement. Les actions coulent sans arrêt, et ce, pendant 800 pages. On découvre au compte-goutte les secrets de la société dystopique dans laquelle cette relation père-fils évolue. Ajoutons à cela beaucoup de réflexions sur la fatalité, le désir et la spiritualité et nous obtenons ce livre ambitieux et excessif qui constitue tout de même, sans surprise, un défi de lecture.
N’empêche, il est évident que Notre part de nuit s’ancre dans une nouvelle tendance sud-américaine qui s’inspire à la fois de la grandeur de Cent ans de solitude, de la plume de Neruda mais aussi d’une vision dystopique du pouvoir à la McCarthy. Enriquez raconte l’histoire d’une famille qui est prête à tout pour reprendre le contrôle de son destin malgré toutes les forces qui tentent de garder le contrôle sur elle.
Tous, moi inclus, tentons de trouver des repères pour décrire avec justesse ce roman exceptionnel, mais dans le fond, Mariana Enriquez a créé avec ce roman une œuvre absolument unique. Notre part de nuit aura très certainement une influence importante sur la littérature dans les prochaines années.
- Autrice : Mariana Enriquez (traduction d’Anne Plantagenet)
- Éditions : Alto
- Parution : 17 janvier 2023
- Pages : 806 pages
Crédit photo: Patrice Sirois