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Les lignes invisibles

L’histoire commence dans le futur, à New York.

Leak, le père, a un passé qu’il cache, rempli de pertes, de traumatismes, d’engagement. Sa femme, Janie, sait des choses, mais pas tout. Militants discrets, ils ont des emplois stables, deux enfants. Simon est un jeune garçon vif et intelligent, qui est au coeur de l’enfance, et de sa naïveté. Siri est une pré-adolescente amoureuse, forte, sportive et censée. Tous ensemble, ils batissent un foyer dans le monde complètement angoissant et contrôlant que sont devenus les États-Unis.

Contrôle, sanctions et oppressions sont les mots d’ordre de cette société tyrannique où il ne vaut mieux pas, entre autres, avoir affaire à la police. Mais même si le passé est loin, même s’il est enfoui, il peut toujours ressurgir pour Leak. Et voilà qu’en effet, un jour, à la fin de l’année scolaire, suite à une manifestation, il est confronté à la réalité : le gouvernement l’a identifié, la police le poursuit. Il doit abandonner New York pour se rendre à Montréal, ville sanctuaire où la population semble avoir davantage de libertés. Avec Janie et les enfants, en grand secret, ils décident de faire un ultime voyage à vélo vers le Canada.

Terrifiant portrait de ce que pourraient devenir nos civilisations si on laisse aller le racisme et l’intolérance ambiantes s’installer, Les lignes invisibles est un roman passionnant, haletant – presque stressant! – que j’ai dévoré. Su Sokol y soulève de multiples questionnements importants sur les dérives de nos sociétés sécuritaires et encadrées et le concept même de frontières. En prenant le temps de détailler le quotidien de la famille Wolfe et le monde affreux dans lequel elle évolue, Su Sokol réussit habilement à nous attacher à Leak, Siri, Janie et Simon… et à faire monter la tension! Les personnages, complexes, évoluent en effet dans un stress omniprésent, qui est incroyablement retranscrit entre autres grâce à la polyphonie du texte. J’ai adoré découvrir les perspectives de chacun et chacune, notamment sur ce bouleversement immense qu’est l’immigration… J’ai aussi particulièrement apprécié la grande simplicité avec laquelle les relations amoureuses et amicales du couple sont abordées – impossible d’en parler sans dévoiler un punch, mais Su Sokol a brillamment réussi à introduire une vision ouverte de l’amour et l’amitié qui m’a beaucoup touchée.

Les lignes invisibles est un livre incroyable qui va m’accompagner un bout de temps. Il y a quelque chose de terriblement vrai dans cette trajectoire familiale, dans les tensions, peurs, joies et deuils que chacun et chacune vit. Je vous souhaite de vous laisser embarquer dans cette aventure à vélo entre démocratie et violences, entre utopie, amours et intolérances.

  • Auteurice : Su Sokol
  • Maison d’édition : VLB
  • Date de publication : août 2022
  • Nombre de pages : 539

Crédit photo : Annick Lavogiez

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