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Marx et la poupée

Marx et la poupée

Maryam Madjidi est née à Téhéran de parents communistes. On la rencontre pour la première fois in utero tandis qu’elle assiste impuissante à l’engagement politique de sa mère enceinte qui frôle la mort. On suivra dans ce roman le récit de sa petite enfance ayant comme trame de fond la révolution iranienne, puis celui de son difficile exil dans une France souvent intolérante. Enfin, les retours espérés mais confrontants se feront en terre natale, ce qui réussira à apaiser la Maryam adulte.

Entre le journal intime et la poésie, on assiste ainsi dans ce roman autobiographique, au parcours cahoteux de l’autrice, parsemé d’abandons multiples et de l’éloignement propre aux exilés, pour peu à peu la voir s’ancrer et finir par appartenir. Ce récit présente donc le chemin tortueux qui mènera cette immigrante à la réconciliation de ses identités multiples.

Je voudrais me taire quand on me demande mes origines. Je voudrais raconter autre chose, n’importe quoi, inventer, mentir. Je voudrais aussi qu’on me pose d’autres questions, des questions inattendues, déroutantes, même absurdes, qu’on me surprenne. Et en même temps, je me vautre dans mon petit monde exotique et j’en tire une fierté jouissive. La fierté d’être différente. Mais toujours cette gêne, cette voix intérieure qui me rappelle que tout ça ce n’est pas moi, que je me cache derrière un masque, celui de l’exilée romanesque. Je vous le donne, ce masque, prenez-le, je le dépose entre vos mains.

Cet écartèlement entre les deux mondes qui la composent donnera naissance à une fillette torturée, mais aussi à une jeune avec un champ de bataille comme identité. Et puis, une fois adulte et assumée, à une femme plus complexe, mais apaisée et assumée.

Il est à noter qu’une belle place est accordée au rapport aux langues, maternelle et française, dans le roman. Dans tout ce qui sera refoulé, il y aura aussi, du moins momentanément, sa langue d’origine. Malgré les missives de son père, elle se refusera à la parler en l’enterrerant bien creux, comme une autre trahison. Ce ne sera que peu à peu qu’elle refera surface, au fil de ses études en français et en littérature des poètes iraniens comme Omar Khayyâm à qui elle consacrera de beaux passages.

Il n’est pas étonnant que Maryam Madjidi ait reçu le Goncourt du premier roman. Avec Marx et la poupée, on assiste d’abord au rude processus d’intégration immigrante, fait d’allers-retours entre l’agitation, l’espoir, l’accablement et l’accalmie, mais aussi à l’émergence une nouvelle voix, intelligente, forte, originale et sensible dans le paysage littéraire français.

 

Autrice : Maryam Madjidi

Éditeur : Héliotrope

Date de parution : 22 janvier 2018

Nombre de pages : 202 pages

ISBN : 9782924666418

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  • Christine Turgeon
    8 juillet 2018 à 11:52 am

    Belle critique! Elle me donne envie de découvrir ce livre et cette auteure. Celle-ci semble avoir un parcours qui rappelle celui de Marjane Satrapi, dont j’ai adoré la bande dessinée autobiographique. L’as-tu lue aussi?

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