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Journal d’un bibliothécaire de survie 

Charles Sagalane nous offre ici un journal construit à la japonaise pour parler de son projet de bibliothèques de survie. En effet, l’auteur, avec l’aide inestimable de ses amis et collègues, a décidé de parcourir les îles et certains territoires du Lac St-Jean afin d’y planter des bibliothèques de survie. 17 au total. Un hasard ? Pas du tout, l’auteur qui voue une fascination et un talent pour les haïkus (17 syllabes) se laissera très souvent guidé par ce chiffre.  

J’ai jeté des ponts entre vocabulaire poétique, mon français maternel et les langues autochtones qui survivent en terre d’Amérique. La réalité de votre œuvre demeure un bien vaste archipel en regard des îlots de mon village natal. Mais le marcheur, le méditant, l’animateur de poésie que vous avez été suscité en moi un enthousiasme contagieux.

– p. 144

Journal d’un bibliothécaire de survie est une lecture qui m’a fait ralentir. Un savant mélange de poésie, de réflexions sur notre rapport à la nature et à la lecture m’ont fait prendre le temps de savourer ce journal. La passion de l’auteur pour les haïkus est transmise au lecteur. Je ne m’étais jamais arrêtée sur cette forme de poésie, mais il réussit à nous faire apprécier ce tercet si court et si complexe, si complet.

À un moment, Sagalane rencontre un ancien diplomate canadien ayant habité et travaillé au Japon qui vend divers objets. Bien que l’auteur n’ait pas les moyens de s’offrir quoi que ce soit, il se fait donner une photo accompagnée d’un haïku composé en anglais par ce diplomate, Thomas Haynes-Paton. Lorsque le bibliothécaire de survie décide de le traduire, il cherchera l’aide de sa communauté virtuelle et on comprend ainsi la difficulté de traduire tout en conservant l’art, la poésie, la forme du haïku qui doit normalement s’écrire 5/7/5 avec un mot de saison :  

Traduire, c’est trahir de son mieux. Préserver ce qu’on peut. Nous connaissons la règle du jeu, Daniel et moi. Pour recréer une voix poétique, cela implique un tas de problèmes de sens, de souffle et de sons. 

Up to their village 

Knowing feet on ancient stones 

Haul cold spring water (Thomas Haynes-Paton) 

Après de multiples versions, de tergiversations, l’auteur du journal en arrive à choisir sa version finale :  

De sagaces pas 

Sur d’anciennes pierres 

Monter l’eau jusqu’au village (traduction finale) 

On ne peut qu’être admiratif envers les poètes et les traducteur.ices, comme Charles Sagalane. Ce Journal d’un bibliothécaire de survie est une très belle découverte et j’espère pouvoir me rendre un jour à une de ces bibliothèques afin de lire sur une de ces petites îles si bien décrites dans le récit.  

  • Auteur : Charles Sagalane 
  • Maison d’éditions : La Peuplade 
  • Parution : 2021 
  • Nombre de pages : 405 

Crédit photo : Valérie Ouellet 

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