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Mademoiselle Samedi soir

Mademoiselle Samedi soir

Pour l’équipe des éditions Alto, il était insensé que l’auteure montréalaise Heather O’Neill, véritable rock star de la scène littéraire canadienne, soit pratiquement inconnue dans sa ville natale. Comme O’Neill écrit en anglais, elle a longtemps été ignorée par la scène littéraire québécoise. Toutefois, Alto s’est donné comme mission de nous faire découvrir sa plume via la traduction de l’incroyable Dominique Fortier et pour une troisième fois (La vie rêvée des grille-pain, 2017 et Hôtel Lonely Hearts, 2018), c’est une réussite totale.

Mademoiselle Samedi soir est Nouschka Tremblay, fille du célèbre chanteur québécois Étienne Tremblay. Son frère jumeau Nicolas et elle ont vécu toute leur vie sous les projecteurs à cause du succès de leur père et la protagoniste décide de finalement prendre sa vie en main pour être autre chose que la fille d’Étienne Tremblay. Elle délaisse ainsi sa relation fusionnelle avec son frère pour se lancer dans les concours de beauté, la chaleur des hommes et trouver le véritable amour. L’histoire se passe sur un fond de référendum de 1995 et en plus d’être une quête personnelle troublante pour la jeune héroïne, elle devient une réflexion sur la culture d’une nation elle-même en pleine crise identitaire.

La plus grande qualité d’Heather O’Neill est évidemment sa plume. On nage dans un univers à la fois triste et drôle, doux et amer, magique et réaliste. O’Neill peut nous raconter la violence avec la douceur du satin. Au cours des pages, on goûte à des saveurs qui nous rappellent Gabriel García Márquez accentué d’une naïveté adorable. Il faudrait réellement être un grille-pain pour ne pas être ému par les mots de l’auteure.

On se surprend constamment à arrêter notre lecture pour savourer la beauté des phrases de la Montréalaise. On ne peut que saluer le travail exemplaire de Dominique Fortier à la traduction. L’auteure d’Au péril de la mer (prix du Gouverneur général) s’est aisément glissée dans l’univers d’O’Neill et nous le rend à merveille. Le duo O’Neill-Fortier pourrait très bien être le Lennon-McCartney dont la littérature québécoise avait besoin.

Alors que nous avons eu un hiver qui n’a fait que se refroidir et s’enneiger, Mademoiselle Samedi soir est l’équivalent de boire un chocolat chaud après une journée dehors. Sauf que le chocolat chaud reste à la température parfaite et se laisse savourer pendant presque cinq cents pages.

  • Auteur : Heather O’Neill (traduction de Dominique Fortier)
  • Éditions : Alto
  • Date de parution : Février 2019
  • Nombre de pages : 482 pages
  • ISBN : 9782896943036

Crédit photo : Patrice Sirois

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